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Français

  • Poème-suaire pour Gênes 14 août 2018 (“Terres de femmes“, 16.8.18)
  •  
  • Le suaire se nomme suaire
  • parce qu’il absorbe les humeurs
  • des morts. On le place
  • sur le visage pour cacher au regard des vivants
  • le travail de la mort
  • dans les traits, les enflures
  • et le creusement final, la réduction à l’os qui reporte
  • la matière contenue d’un corps dans le non fini de l’autre
  • matière, à l’indistinct des mottes et des astres.
  • Le suaire est placé par pudeur
  • sur le visage, pour que ce visage cesse de finir
  • sous nos yeux. Je voudrais qu’ainsi
  • les mots, puisqu’ils ne peuvent assécher vraiment
  • ne serait-ce qu’une goutte
  • de votre sang, rappellent au moins
  • la vie, le profond azur
  • ou l’églantine parmi les cabestans
  • qui vous a fait sourire
  • par son obstination à être vivante
  • dans le chantier perpétuel du port
  • lumineux de soleil mourant
  • ou l’autre soleil, la grandeur radiale de l’aube
  • soulevée parmi des éclats de réel comme une renaissance.
  • Monde contemporain qui vas mourir
  • parmi les mouettes des banlieues,
  • sous la giration de la Voie Lactée comme une verte insomnie de l’univers
  • qui ne nous regarde pas, monde qui es cet infini exister qui ne prévoit pas
  • les mortels, sans nom ni prénom nous redeviendrons choses
  • parmi les choses, sans enveloppe ni nostalgie nous retournerons
  • à l’indifférencié des étoiles. Mais maintenant, maintenant
  • que nous sommes vivants
  •  
  • traduction par Jean-Charles Vegliante
Tu n’auras que la vie (da Gli Scomparsi – storie da Chi l’ha visto – pordenonelegge, 2016)
traduction par Jean-Charles Vegliante

 

Les chaussures ne furent pas retrouvées.
Mais la lumière tombait coïtalement sur le corps de la jeune femme
cristallisé dans le témoignage.
Entre les yeux et le ventre
des traces de lavoir – un parcours inversé pour établir les alibis.
La porte d’entrée avait été fermée à quadruple tour.
 
Elle brûlait comme une hostie dans la matière
lacrymale de fin d’après midi – la tête prise dans les arbustes
et l’opiniâtre répétition des trajets. Pour des raisons inconnues
elle n’a pas pu atteindre ses années
quelle que fût leur fonction singulière, mais un immobile
adieu à la beauté du monde
réchauffait la fibre qui résiste,
cri de joie du corps sans douleur.

Romaine née à Milan (1964), poète et performer, animatrice radio, rédactrice du mensuel “Poesia”, Maria Grazia Calandrone s’occupe aussi de critique littéraire (en particulier pour “il manifesto”). Interventions, lectures théâtrales et manifestations poétiques fréquentes. Elle a publié plusieurs recueils (La scimmia randagia, Milan, Crocetti, 2003, prix Pasolini Opera Prima), jusqu’à Serie fossile (id. 2015 – prix Marazza) ou La vita chiara (transeuropa, 2011), et participe à des performances publiques. L’infinito mélo, pseudo-roman, a récemment inauguré une collection de l’éditeur Sossella avec CD de ses propres textes.
je ne suis que le blanc de la bête
et la splendeur de son œil
noir,
rond,
doux
 
je suis la mansuétude de l’univers
roulant sur elle-même
comme l’œil dans l’orbite de l’
animal,
 
             idole
endormie
qui là, sur le seuil de l’abysse, échappe la première larme
de joie.
 
                                  il a fallu
des millénaires pour cette unique
larme,
 
                        devant laquelle s’incline, comme s’incline
un champ
de fleurs battu par un vent
sidéral, cet humain
 
pluriel, couronné
de soleil et fait de la même pâte
que la bête,
 
                        cette misère qui désire être
caressée
par la miséricorde de ton regard
 
traduction par Clément Lévy et Giuseppe Girimonti Greco

traduzione a cura del gruppo di ricerca CIRCE dell’Università Paris 3

L’ultima stanzaLa dernière pièce

Avec le temps la complexité de la maison
s’accroît – c’est un filtre alchimique, un décanteur
d’eaux industrielles mélangées
à des métaux solaires – qui dépose l’or du monde
par les fenêtres dans nos cheveux.
Assis, nous sommes inclus dans la recréation
étant donné une marge concrète de manœuvre dans les espaces communs.
Nous tombons goutte à goutte du bec des alambics
directement sur les objets
au niveau du sol, la voix lointaine. Nous apprenons à reconnaître
la mèche effilée, la plainte
de l’animal dans le distique prolongé des colporteurs.
Par l’ouïe nous jetons hors du corps (fermé
et très noir) de rayonnantes racines.
Maintenant les portes sont ouvertes : rêves
du dimanche. Le peuple
fait communiquer ciel et terre avec ses propres besoins.
Mais nous ne savons pas dans notre maison – étant donné
la délicatesse et l’abondance des organes, quelle est sa finesse.

Corps-diaphragme en majeure partie
 
De la végétation affleure le corps
des pommiers – avec leurs médaillons d’or. Bannières de calme plat
dans le blanc de la machine adriatique – déboussolée
par la tempête immobile des estacades, sanctuaires tangants
de bois et de rebuts
ferroviaires sur plusieurs mètres de mer. Les hommes de la montagne
dominent l’Inquiet de leurs plateformes – ils prolongent dans le deuil des eaux
la terre, sa verdeur de meule sylvestre – et le soleil
règne plus grand que la peur.
Les manches retroussées, les pieds nus
– de la côte ils prononcent les Nombres donnés
par les étrangers
qui cultivent l’ange des rêves – cœurs pleins de larves
et de pissenlits – arrachés à la beauté boréale. Ah, si nous étions !
forêts de mâts dans la brume – voici le Souverain Ensemble
sur les taches du Neutre de tous les jours – le pollen dispersé
par le vase des siècles, où la somme des tempêtes est égale
au froncement inconstant d’un sourcil.
Mettez donc ma santé à côté de celle de notre frère
avec des projections de neige polluante sur les pins
qui ont des ombrelles de méduses terrestres pour que rien ne manque, pas même
des roses hématiques et des rouleaux de parchemin dans les mains – ou discours
sur le climat et le sol et sur les passerelles rongées, qui changent
la mer en terre – frêles – comme toi mon amour, qui sillonnes le large
de tes sabots de pierre et manifestes une originelle collision.

***
OPUS 9/11: LA CÉCITÉ AMOUREUSE
I. Exorde
Merci pour les arbres et les fleurs rouges
et pour toute cette herbe qui de nuit semble marcher
vers un point de profondeur sous les piliers
que soutiennent les ponts
avec des fleurs
et des étoiles. Merci pour les colonnes et pour le soleil immobilisé
dans les brouettes, merci pour les corps défrichés
des circonstances anthropologiques
et pour ce vide de sens dans les cheveux trempés
des enfants.
Ensemble durant les saisons
les corps disparaissent
comme les arbres
vaincus par une tristesse empoisonnée
et le soleil – opus
incertum – s’est cassé, immobilisé sur la marchandise
qui glissait
toute seule vers la fin de la marchandise.
Deux calames
comme des poignards vont tomber très vite
du ciel et vont frapper au sommet
l’œuvre à pic sur les mines d’or. Accompagnés l’affaissement vertical
des deux cent mille
tonnes d’acier certifié, cinq cent cinquante deux mille
et cinq cents mètres cubes
de béton, et du plomb coulera mélangé au sang
des sauveteurs
sous le point d’impact et les tonnes
d’amiante qui enveloppent les poutres
seront libérées dans l’atmosphère :
les sauveteurs verront
poursuivis par une bête composée de
dioxyde et de ce qui restera d’humain
mélangé aux ruines
parce que de là haut ils auront lancé
des projectiles des corps fondus
aux décombres
des titans dans leur chute
libre, comme l’expliquait Galilée.
II. Prière du voyage
Merci pour les bateaux arrêtés
dans la grande et très belle journée
avec les ponts abaissés et les cabines
pénétrées de lumière.
Ils diront que dans la fumée se formaient des visages
étrangers. Ils accuseront
les innocents
les attacheront dans leurs maisons
avec les armes.
Tu insères la langue dans le fermoir
et demande la grâce du martyre.
Merci pour l’aube fraîche et sans vent
qui précède le commencement
et les vols clairs et calmes
qui séparent l’après-midi  en deux coupes
d’argent éphémères.
Je n’avais pas d’ennemis, j’étais
suspendu, j’étais assis à penser
je ne sais
endurer l’amour, le cœur se corrompt et se résigne
sur la branche
et une euphorie m’encercle dans le sang comme les naseaux d’un joyeux
ânon qui broute
la clairière au milieu de la matinée.
Ne crée pas une excessive souffrance à l’animal
durant le sacrifice
contrôle que la lame soit tranchante.
Matinal est mon cœur
libéré de l’homme et dominical
le brin de paille
entre les dents du très haut.
Quand ils ont étendu le corps sur l’autel dans l’air il y avait surtout le silence
et le mercure de milliers d’ampoules
radiations et vanadium plus que dans l’incendie
des puits de pétrole et dans la surdité des fours crématoires.
Merci pour ce fils de piété qui résiste
dans la trine sur son cou à elle.
III. …et tu redeviendras poussière
Devant le mur la constellation. À chaque chose tombée
correspond une lumière, un espace
qui auparavant était occupé. Pense que si tu tombes
tu fais la lumière.
Voilà les tuyaux et les bobines et aucun reste reconnaissable, ni
un gouvernail de queue
ni les moteurs Pratt&Whitney en acier et tétane, mousses que soutiennent
les feux de kerosène
mais le turbo d’un ScottWarrior sans les lames de ventilation
et l’odeur de cordite. Le soleil
circule sur les fragments comme une persistence
de bonheur. Souvenir
d’une fille légère comme une feuille qui s’est détachée toute seule
de l’arbre caverneux du gratte-ciel
comment dire
moi pour la dernière fois.
Au centre de mes yeux elle battait la lumière et se tordait
dans la colossale démolition
puis je voyais un homme lâcher sa prise
comme un de ces sérieux coups de vent
qui stabilisent la radicalisation de l’arbre.
Les corps se distinguent des gravats
par la vitesse de leur chute
et parce qu’à la différence du béton ils s’accumulent sourdement
sur l’incompréhensible
blancheur de l’asphalte
comme masses efficaces et sans angle
pendant que le béton devenait poussière – mais le béton
comme ce qui n’est pas vivant
ne retourne pas à la pousssière.
Les chiens ensuite sont morts par dizaines. Seulement 10 secondes
pour déposer l’équipement et monter dans le rugissement des gravats. Les coteaux
enchemisés de puits de soleil
et d’un son de haubois aux étoupes brûlées
précédé d’un crépitement continu : des hauts-parleurs
la musique de bureaux – aucun horoscope
annonçait le désastre – mais l’écho d’une antique prophétie
et la rumeur des corps qui tombaient
pauvres corps faits de peur
primordiale, un geste comme celui d’avoir jeté le pain.
IV. Absence remarquée
Il était ainsi certain que moi aussi je sus où aller.
(témoignage d’un survivant)
Soit orgeuilleuse parce que
j’ai dépassé le mythe de l’amour, je ne crois
plus que le monde finisse
pendant que tu permets à un  autre de regarder
mais je crois que la terre devient moins innocente
au pointde décliner ma date de décès comme la donne la lumière d’une étoile – je crois
que les coeurs immatures
seront transportés avec les autres gravats
dans des dépôts transocéaniques – et je crois également
su’ils se corrompront l’un par l’autre
et produiront un silence inconnu.
Le code 10-45 signifie morts, signifie
ils ne feignent pas mais je suis frappé
dans toutes les extrémités
ils sont dans le silence entier
que le corps produit
une fois seule
avant de devenir
le bassin pour entreposer
des poussières élémentaires
et des omissions.
Je pense que c’est un péché d’être triste
je pense que ça suffit de regarder
les marbres derrières lesquels il y a du sang des animaux et le souffle
et les souliers chaussés pour le sacrifice
je pense que ça suffit de penser
à combien de millénaires de chant comme une striure jaune il nous a fallu attendre
pour produire la forme de ton crâne et à l’extrème point
mettre ton sourire.
L’amour était une patine du nouveau soleil
Que tu obscurcissais selon ton plaisir
et tu tissais un suaire :
je n’étais plus le corps parcouru
de fleuves mésopotamiens, j’étais pavé des coups de l’abandon
les restes d’un minaret inondé
du système anti-incendie. Dans les jours
qui précédèrent le désastre
les chiens furent éloignés
parce qu’ils ne flairaient pas les préparatifs
de la démolition. De ce qui me reste
spire autour de ton coeur
comme la fumée corticale qui signifie
épuisement de la combustion
première : je suis
poussière sur ton coeur, blanche bouffée
des explosions latérales.
V. Exode
Souvenir de l’éclair argenté de tes yeux et de l’éclair
de l’avion. J’ai les molaires ébréchées par leur grincement
durant le sommeil, parce que de l’épicentre de ma bouche chaque nuit remonte
la machination : l’incendie qui essaimait dans les tours
ne pouvait causer cette éclipse
de grilles et de béton, ni déposer sur la place des géants cette judicieuse pyramide de gravats, liserons
et achèvements. Ça ne suffit pas le feu
à effriter le coeur des géants comme une pure expulsion de déchets, mais de sévères
PIERO BARBETTA ET ANTONIO BOCCUZZI, LES SURVIVANTS, PARLENT
Dans la nuit entre le 5 et le 6 décembre 2007 dans les aciéries de la Thyssen Krupp du Corso Regina Margherita à Turin une bride de la niveleuse est silencieusement sortie de sa voie. Elle a produit du frottement contre la métallerie. L’étincelle produite a incendié l’huile de rebut qui normalement ressue des tôles. Les ouvriers, prévenus par un collègue de l’équipe de nuit de la ligne 5 de recuit, sont sortis en courant de la salle de contrôle, nommée chaire principale, avec l’intention d’éteindre les flammes, mais ils ont trouvé les extincteurs presque vides. Entre temps, les tubes portants de l’huile à haute pression, qui ne résistaient pas à la chaleur brûlante, ont explosé. Ils ont provoqué des énormes vagues de feu qui ont tué 7 des 9 ouvriers présents.
Les ondesdu feu dérivent
de la combustion instantanée de l’huile
nébulisée : l’air même
était feu
et ils tombaient des outillages en équipements des chariots-pont,
des corps tombaient comme amandes amères,
corps-éponges
d’acide cyanhydrique
qui était absorbé par la peau : chacun de mes camarades
endossait un suaire de sang brûlé, mètres
carrés de chair criarde, crevasses de charbon
dans la musculature du thorax
et la blouse de l’éloignement entier
les voilaient : mes camarades, une fois
enveloppés
dans la gousse de feu –  dans le caverneux
raclement du feu –devenaient choses
brûlées
et identiques, surhumains
costumes de bois mort.
Mes camarades étaient revêtus de la sécheresse du mal. Chacun
hurlait de son écrin de venins.
Pendant que j’éteignais ce qui restait
de lui, il hurlait Piero comment est ma figure.
Jele reconnaissais à sa voix
puis j’ai soulevé la couverture
qu’on lui avait mis sur la tête
et il n’en y avait plus rien
de lui sinon sa chair sans défense
sinon sa voix, la surhumaine
charité de bois.
Rome, 23 décembre 2010
UN ARBRE DE FUKUSHIMA PARLE, 11.3.11
Il n’existe personne à accuser. Personne contre
la peur de cet incompréhensible
mal. Nous sommes tellement exposés. Tellement désarmés. Invisibles comme les radiations.
Transatlantiques et avions de guerre
dans l’hypnose noire
des vagues. Cette fois
c’était la mer. Et c’était  la terre. Tout
dépasse le seuil de son incandescence. Aucune mère
remontée du fond de la mer – nous console.
Terre bienveillante et terre terrible
qui me soulève. Les barres des réacteurs sont exposées
et la cruauté de la mer est exposée, exhumée la puissante amertume
de la mère. Noms communs de choses inconnues. Maintenant tu la vois
la mort toujours incluse comme un doute
dans l’amour terrestre. Maintenant tu vois tout l’abandon.
Cheveux noirs comme la montagne et les colonnes de sons à traverser.
Tiens la chair en haut comme un grincement de freins. Je suis
une chose qui a toujours espéré. Une confiance obtuse
dans la bonté des hommes et de la nature. Seul pour cela, seul pour la confiance
dans la bonté des hommes et de la nature il est resté dans mon cœur
tant amour. Répercussions. Scories. Combustion stable. Mais je serai pour toi le coin du cœur. Le filament
noir de carbone. Tu peineras à distinguer les parties molles, de nous ce que l’amour laisse vivant.
Ô corps réfractaires comme rayons – corps-denses
pelotes de lumière
entre les sourires-ancre des fils – la radiation
totalement libre des impuretés.
Le cœur est un matériel surhumain
il nous pousse dans le thorax comme un gâteau de miel.
Que l’amour soit cette créature – et qu’il soit ! –
la plus féroce du soleil.
 
Traductions par Bruno Cany et Marco Zulian
 
***
TOUTE LA FLORAISON (L’IMMORTEL)

Comme elles sont effrontées les roses
comme elles sont belles come elles
sont
une affreuse multitude les roses
aux limites du royaume et sous les
arcs
des paradis les tojours vivantes
roses – et differentes
au coeur
détroné parce que
le coeur boit les fonds minéraux
de la pluie e des homes
boit
jusq’à l’éclat de la coupe – l’usure
avec grand intérêt la douleur
jusq’à l’éclair secret
de qui ne meurt
plus: l’immortel
il vient noir et secret comme la rose
entr’ouverte par les plaintes avec sa
bouche
dépouillée – éventrée
fleur de jardin
avec fauteuils en pierre et égoutteurs
rouge et mal élevé
coeur
qui disloque même le soleil
arrêté sur les décharges et sur les lits
au matin, quand nous sommesplus
ouverts et plus clairs et
nous ne croyons pas à la mort mais
aux colibris
qui tiennent vives les forêts
nous ne croyons pas au dociles
évidences mais aux bêtises
aux mots qui essaiment dans
l’invisible
dstinée
à faire briller le Coeur comme un
éclait
en or dans la poitrine de goudron des
disparus et dans lequel
brille l’or majuscule du monde – dans
lequel
le partout – dans lequel
le toujours, la promesse de toutes les
roses
et le silence tombé après par les
roses, le silence
de personne – seul
plus d’amour, seulement plus de
roses, ma
déposition, ma
rose
immortelle.

traduzione di Romina De Novellis

SUR LA BRANCHE

L’amour aussi possède ses broutilles, cette mauvaise herbe des oiseaux plantifs
poses dans une pause de l’air, sur la branche, désarticulés
ou balances par le vente. Le pause est l’art de la mort,
ou des courtes distances. Racontez ce qu’il en reste. Recontez les résidus des genévriers dans le pli
à contre-jour de la rétine. Racontez la solitude. La déplacer 
est l’occupation des années
de conversion, l’inexpérience de rougir
pour rien, faire naître des pensées ou se fonder dans l’air.

LE CORPS UNIQUE

I

La stupeur a fait naître le vol.
Il vient de la contrainte des corps. J’apprends un bonheur
plus grand. L’arbre est le lieu de la persuasion, le raccourci
des vols. Le vent donne vie
à sa race neutre, libère dans l’ouïe des hirondelles
un affleurement venu des sépultures. Dans la plaine, elles semblent nées d’une extinction.

II

Le retour est un vol qui change
de directions systématiquement lontaines. Quand il étend de nouveau
son pouvoir sur les arbres, la hauteur en est prouvée, ou se réduit
en obstacle le reflux.
Où la terre manque, manque la guérison consciencieuse des branches.

III

Par-delà l’espace, la gratitude des oiseaux.
On en perçoit le calme. À présent ils arrêtent de se raréfier. Le ciel
est le sentiment de la terre. La biologie céleste des vols groupés
assimile
dans l’air un bonheur différent. L’attroupement
invite au retour. Déjà regardant de la coline on ressent
le respect des arbres autour de la maison. Sur les reliefs, l’équilibre du vent
fouille des lieux secrets, des oscillations,
la denonciation qui de nous fait un souvenir. Nous sommes l’œuvre d’un matin ensoleillé.

IV

Si, venue du fleuve, la présence de l’eau ne cesse pas, c’est qui’il lui est possible d’avancer
à l’intérieur des territoires donnant
sur des ouvertures de lumière
comme des ruelles. Une plaint d’animal domestique attire notre attention.

V

De l’herbe nous frappe les épaules. Les enfant en particulier donnent l’apparence
d’une démission fortuite. Il en reste
l’impression d’un léger poids,
l’air, le déplacement.

VI

Les années chauffent la caverne de la voix, regrets
comme un excès de soleil
sur le sommet nu des sentiments où nous rejoignons
nos proches
après les trajectoires des oiseux. Dans le volume d’air d’une tente nous ouvrons l’amphore des vols
cachés. Le visage, tourné vers le crépuscule,
attire la clarté, la part de lumière qui arrive
à ressembler
au progrès d’un état de veille, à l’amour qui guérit, qui afflige.

(1996)

traduzione di Carino Bucciarelli (in “Le Fram” n. 3 autunno-inverno 1999, Belgique, Fonds National des Lettres)

de : CINQ MÈRES

Le système lymphatique des morts sur les roses
les flammes encore enchevêtrées
à la courroie des nerfs et hélices volatiles 
de mèches : les poses homériques de la matière
à moitié morte. Les ensevelis
sur la terre (chœur : la terre), s’ils auront
pitié de nous ils sembleront tombés
dans un sommeil dénué de jugement
comme un énorme repas
de chair humaine, ils sembleront mêler par une égarée 
résignation (chœur : chair
– regards 
à la boue enfumée de Gernika )

Boue qui dort, un document en blanc – 
objets 
dépourvus 
de limite avec la terre

Elle entière 
c’est un marais de sang qui s’écroule 
de la bouche du fils (chœur : Fils !), ton nom
était l’orgueil de ma bouche, s’éclosait du blanc des incisives, il roulait entre les rangées le soir comme des perles déjà parties dans la quiétude de l’aube ses voyelles
car dès le premier souffle matinal
un sourire s’ébauchait de la poitrine à te prononcer.

La bouche bée ressemblait 
au silence d’un astre.
c’est cela que vous avez fait.
(Chœur : C’est cela que vous avez fait)

Comme un voile de mariée est la couronne
d’œufs 
pondues par les mouches sur sa tête
complètement fait 
pour la vie qui se balance
au vent et imite les feuilles comme des signaux lumineux jaunes
sur la descente de San Miguel.

E chaque corps se plie sur la terre, chaque corps s’incline
comme ça
Envers eux et pousse – pousse
les bras jusqu’en bas
la terre la cohue pitoyable des vivants. Viens
Rose, viens Paul, Marie, Alexandre, Carmen, je vois 
tes blanches colonnes de méditation, je vois tes rêves blancs,

je vois les vélos et les lanternes et la structure entière 
je me souviens et me souviens 
demain, la date
de ton mariage
et les padons effrontés comme des langues de dragons à claquer et à voleter
pendant que la voiture vous menait (e o a ?) et sud : demain. Hasta luego.

Un bois de forêt et ta langue
comme un grand animal marin n’a plus de force
pour s’opposer aux courants. Tu restes
comme macération
comme une tache d’invisible
dans le désastre serein de la ronde terre
et parmi tes muscles célestes tu pends comme une èche le fil de
l’acrobate, le vert cordage, 
le lance-flammes posthume
de cette langue terrestre.

Cela me semblait son souffle qui écumait hors de la bouche mais il n’était pas en paix avec son âme peut-être il était négligé par une sainte leçon de désenchantement 
Comme le feu à la base de la croix

Je les vois 
qu’ils sourient et disent viens
Marie, viens nous prendre, je sens
tout ce mouvement 
d’enfants et je suis malade qu’ils ne soient pas à la maison par contre, je les vois
comme des cordes de feu
ou il me caressent les cils
muets, en manque de soi comme langage.

Ne marchez pas sur le visage de mon fils car
lui
il doit encore connaître le monde.

J’étais parsemée par la désolation de l’arbre qui
ne gouverne point
l’écroulement de ses membres, il ne cicatrise pas
les émondes sanglantes 
et ne trépasse pas. Je le sens dans le cœur , ainsi
taché
par le moût cru de son corps et je sais que de la croix de son corps
les oiseaux descendront

Tu es pour moi un ange et une rose. 
sur la terre piochée et contemplée
avec la lenteur prodigieuse des travaux naturels 
je te donne mes premiers baisers de traversée.

traduzione di Valeria Tacchini

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